"La guerre de Troie n'aura pas lieu", dit Andromaque quand le rideau s'ouvre sur la terrasse du palais de Priam. Pâris et Hélène ne s'aiment plus, mais les Troyens feront tout ce qui est en leur pouvoir pour conserver celle qu'ils appellent "la beauté", même au prix de la guerre. Chacun de leur côté, Hector et Ulysse tentent vainement de sauver la paix mais la Fatalité est plus puissante que la volonté des hommes.
Pièce en deux actes qui mêle les grands thèmes classiques aux inquiétudes modernes, elle a été présentée pour la première fois le 22 novembre 1935 au Théâtre de l'Athénée sous la direction de Louis Jouvet. Son succès éclatant et immédiat ne s'est jamais démenti depuis.
L'amour de Bella Rebendart pour Philippe Dubardeau est contrarié par la vieille inimitié entre leurs familles, puissantes et politiquement opposées. Plus qu'une satire des moeurs de la Troisième République, l'on peut voir dans Bella une transposition moderne de la rivalité des Capulets et des Montaigus, interprétée avec une liberté pleine de fantaisie. Bella est une femme de notre temps, mais elle représente aussi, comme les autres héroïnes de Giraudoux, " celle par qui tout arrive ".
En avril 1769, avant que son équipage ne débarque sur l'île d'Otahiti, le capitaine Cook délègue Mr. Banks, naturaliste de son expédition, auprès du chef des insulaires, afin de prévenir tout excès sei:suel encouragé par l'accueillante population indigène. Un hilarant dialogue de sourds s'instaure entre le rigide émissaire anglais et le « notable » Outourou, partisan d'une joyeuse immoralité. L'entreprise de colonisation morale va tourner au fiasco.
Le Giraudoux libertaire, le styliste du plaisir sauvage, triomphe dans cette comédie en drapant ses scènes de dialogues équivoques et mordants. C'est drôle, excitant, à chaque page.
Un Français, le Limousin Forestier, grièvement blessé dans les lignes allemandes durant la guerre de 14, est ramassé, amnésique, sans identité, par le major Schiff de Stralsund qui en fera un grand intellectuel allemand. Un ami français le reconnaît quelques années plus tard à Munich... Giraudoux nous parle de l'Allemagne de Goethe et de Weimar, de Nuremberg, de Dürer et de Louis II.
Adorable Clio, titre paradoxal et bien giralducien, rassemble six récits d'une des périodes où la muse de l'histoire a lâché les instincts les plus meurtriers de l'homme moderne, la guerre de 1914-1918.
Le premier, « Nuit à Châteauroux », est célèbre pour les éloges qu'il valut au jeune Giraudoux de la part de Marcel Proust : « Il n'y a pas une ligne dans ce livre de Giraudoux où je n'aie à admirer. » C'est « sa » guerre de 14, choses vues d'un écrivain sensible qui se garde du style héroïque alors si à la mode. La vie telle que le conflit qui s'éternise la transforme, perdant toute logique. Le germaniste Giraudoux y pressent, y évoque déjà la nécessaire réconciliation avec l'Allemagne. Il achève son livre, peu après l'armistice, par un émouvant « Adieu à la guerre ». « Comment la guerre commença ? Nous dansions au sous-sol d'un casino : on annonça la guerre. |...] Comment la guerre se passa ? En réveils, en réveils incessants. [...] La guerre est finie. Voici que je ne m'endormirai plus sur l'épaule d'un bourrelier, sur le c½ur d'un menuisier [...] Me voici seul. »
Publié en mars 1917, le livre se compose de trois récits, « Le retour d'Alsace, « Périple » et « Les cinq soirs et les cinq réveils de la Marne ». On y voit le sergent Giraudoux, attaché au colonel de son régiment comme secrétaire-interprète, car il parle allemand et peu comprennent les Alsaciens que l'armée française est allée protéger et qui parlent majoritairement en dialecte. Giraudoux, jeune intellectuel, y éprouve la grande fraternisation de l'été 14 : « Chers Durand, et vous chers Dupont... chers Français ! » Puis c'est le repli vers la Marne. Paris est menacée. On fait sauter les ponts derrière soi. Et c'est le récit d'autant plus hallucinant qu'il décrit sans emphrase « la surface ravagée de la guerre, avec [...] toutes ses dépouilles, képis, souliers, avec une paire de bretelles étendue comme à l'étalage, avec une main raide qui sort d'un silo. »
Pour conquérir Reginald, diplomate, homme politique, homme tout court, Nelly "gentille et frivole femme", s'invente un passé munificent, un présent romanesque. Confondue, l'acharnée de ses songes ne désespère pas et force le mensonge à devenir réalité, mais l'amour ne reviendra pas... {La Menteuse,} écrit en 1936, ne fut publié qu'en 1969.
Giraudoux aimait les jeunes femmes; {Eglantine} (1927) préfère les hommes mûrs. Entre l'aristocrate Fontranges qui, d'une transfusion, lui a donné son sang, et le financier Moïse qui veut la couvrir d'émeraudes et de rubis, son coeur balance, sa raison s'amuse. L'auteur sort seul vainqueur de ce marivaudage pervers, avec le plus rare des bijoux: sa phrase.