Comment peut-on être boxeur professionnel ? Sociologue initié à l'art de la frappe, " Busy " Louie nous emmène au pays des pugilistes de l'hyperghetto de Chicago pour y goûter la saveur et la douleur de l'action entre les cordes. Loin des clichés journalistiques et littéraires, il nous fait palper la trame du lancinant labeur quotidien dans le gym, îlot d'ordre et de morale dans un océan de destruction et de dangers ; partager la dévotion des boxeurs au catéchisme du " sacri?ce ", code de vie ascétique qui régule leur relation au monde profane - nourriture, vie sociale, sexe. Et il nous fait vibrer lors des tournois amateurs et entrer dans les coulisses et l'intimité des matches des galas professionnels.
Maîtriser un art du corps honori?que, s'immerger dans un monde sensuel et moral, ressentir le frisson de l'affrontement sur scène, entrer dans cette communion homoérotique et cependant chaste qu'est le combat, accéder à un grade supérieur de masculinité, et construire un soi glorieux dont attestent la clameur de la foule, l'estime des pairs et l'admiration des proches : tels sont les béné? ces existentiels que le pugilisme garantit à ceux qui s'y adonnent, à d éfaut de servir de vecteur de promotion économique et d'ascension sociale. Risques physiques et pro?ts symboliques, ce qui ne veut pas dire illusoires ou secondaires, bien au contraire, car l'homme est, foncièrement, un animal spirituel autant que de chair et de sang. Ainsi se résout le mystère de l'homo pugilisticus, pris dans les rets de l'amour doux-amer qu'il voue à son métier.
Textes et photographies de Loïc Wacquant
Les Prisons de la misère est un livre important pour les éditions Raisons d'agir. Paru en 1999, il a été vendu a 20000 exemplaires et a été traduit dans vingt langues. Ce livre et son auteur, professeur à l'université de Berkeley, sont à l'origine d'un débat très intense sur le rôle de l'incarcération aux Etats-Unis et dans le reste du monde. La thèse qu'il soutient est que l'État pénal est en train de prendre la pace de l'État social et que l'emprisonnement devient un moyen massif de répondre à la misère produite par les politiques néo-libérales. Plus généralement, on assiste à un processus d'incubation et d'internationalisation des slogans (" la prison, ça marche "), des soi-disant théories (la " vitre brisée ") et des mesures (telles que le recours accru à l'incarcération, les peines-plancher, les camps de redressement et les couvre-feu pour jeunes) qui composent ce nouveau " sens commun " punitif, conçu pour endiguer la montée de l'inégalité et de la marginalité dans la ville postindustrielle.
Dans cette nouvelle édition, l'auteur revient sur la réception internationale des Prisons de la misère comme révélateur des évolutions pénales dans les sociétés avancées au cours de la décennie passée. Il établit comment la tornade sécuritaire mondiale inspirée par les États-Unis, que le livre détectait en 1999, a continué de faire rage de toutes parts. De fait, elle s'est étendue des pays du Premier monde à ceux du Second monde et elle a transformé les enjeux et les mesures politiques du châtiment pénal à travers la planète de façon que nul n'aurait pu prédire ou même croire possible il y a seulement une quinzaine d'années. L'auteur développe et étend son analyse du rôle des think tanks dans la diffusion de la pénalité " made in USA " à l'Amérique latine. Enfin, il révise le modèle initial du lien entre néolibéralisme et pénalité punitive, révision qui débouche sur l'analyse de la refonte de l'État à l'ère de l'insécurité sociale.
Fouillant le système qui, inventé aux États-Unis, sert de référence à tous les États capitalistes modernes, ce livre commence par démontrer le balancement du social au punitif, puis il analyse la " réforme sociale " comme aboutissement de la misère du social recomposé ; pratiquant l'anatomie de la montée de l'État pénal, et la manière dont il cible le ghetto et les délinquants sexuels, il conclue sur les implications de cette évolution et son ouverture sur l'Europe.
Rompant avec le biais exotisant des discours politique et médiatique, ce livre emmène le lecteur au sein du ghetto de Chicago et d'une cité déshéritée de la banlieue industrielle de Paris. Où l'on découvre que la marginalité urbaine n'est pas partout tissée de la même étoffe. Mêlant observations de terrain, données statistiques et rappels historiques, Loïc Wacquant montre que l'implosion du coeur noir de la métropole étasunienne s'explique par le retrait de l'économie salariale et de l'État-providence favorisé par des politiques publiques de ségrégation et d'abandon urbain. Quant à la prolifération des « quartiers à problèmes » au pourtour des villes européennes, elle n'annonce pas la formation de ghettos à l'américaine, mais traduit la décomposition des territoires ouvriers sous l'effet conjoint de la désindustrialisation, de la précarisation du travail, et du brassage ethnique de populations jusque-là cloisonnées.
Le travail de comparaison souligne le rôle-clef de l'État dans l'articulation des inégali-tés de classe, de lieu et d'origine des deux côtés de l'Atlantique. Elle révèle aussi l'émergence d'un nouveau régime de marginalité nourri par l'instabilité du salariat, le recul de l'État social et la concentration, dans des districts mal famés, de catégories dépourvues d'un langage collectif leur permettant de se forger une identité et des revendications collectives. En éclairant d'un jour nouveau le mélange détonant entre la misère, l'opulence et la violence dans les métropoles du Premier monde, Parias urbains offre des outils précieux pour revigorer le débat public sur les inégalités sociales et la citoyenneté.
Building on three decades of comparative research on marginality, ethnicity, and penality in the postindustrial metropolis, Loïc Wacquant offers a novel interpretation of Pierre Bourdieu as urban theorist. He invites us to explore the city through what he calls the trialectic of symbolic space (the mental categories through which we perceive and organize the world), social space (the distribution of capital in its different forms), and physical space (the built environment). On this reading, Bourdieu's topological sociology gives us the tools both to energize and also to challenge the canon of urban studies and to redraw their theoretical landscape. Compact and incisive, Bourdieu in the City will be of interest to students and scholars in sociology, anthropology, geography, urban studies, urban planning, architecture, and social theory.
Breaking with the exoticizing cast of public discourse and conventional research, Urban Outcasts takes the reader inside the black ghetto of Chicago and the deindustrializing banlieue of Paris to discover that urban marginality is not everywhere the same. Drawing on a wealth of original field, survey and historical data, Loïc Wacquant shows that the involution of America's urban core after the 1960s is due not to the emergence of an 'underclass', but to the joint withdrawal of market and state fostered by public policies of racial separation and urban abandonment. In European cities, by contrast, the spread of districts of 'exclusion' does not herald the formation of ghettos. It stems from the decomposition of working-class territories under the press of mass unemployment, the casualization of work and the ethnic mixing of populations hitherto segregated, spawning urban formations akin to 'anti-ghettos'. Comparing the US 'Black Belt' with the French 'Red Belt' demonstrates that state structures and policies play a decisive role in the articulation of class, race and place on both sides of the Atlantic. It also reveals the crystallization of a new regime of marginality fuelled by the fragmentation of wage labour, the retrenchment of the social state and the concentration of dispossessed categories in stigmatized areas bereft of a collective idiom of identity and claims-making. These defamed districts are not just the residual 'sinkholes' of a bygone economic era, but also the incubators of the precarious proletariat emerging under neoliberal capitalism.
Urban Outcasts sheds new light on the explosive mix of mounting misery, stupendous affluence and festering street violence resurging in the big cities of the First World. By specifying the different causal paths and experiential forms assumed by relegation in the American and the French metropolis, this book offers indispensable tools for rethinking urban marginality and for reinvigorating the public debate over social inequality and citizenship at century's dawn.
At century's close, American social scientists, policy analysts, philanthropists and politicians became obsessed with a fearsome and mysterious new group said to be ravaging the ghetto: the urban "underclass." Soon the scarecrow category and its demonic imagery were exported to the United Kingdom and continental Europe and agitated the international study of exclusion in the postindustrial metropolis. In this punchy book, Loïc Wacquant retraces the invention and metamorphoses of this racialized folk devil, from the structural conception of Swedish economist Gunnar Myrdal to the behavioral notion of Washington think-tank experts to the neo-ecological formulation of sociologist William Julius Wilson. He uncovers the springs of the sudden irruption, accelerated circulation, and abrupt evaporation of the "underclass" from public debate, and reflects on the implications for the social epistemology of urban marginality. What accounts for the "lemming effect" that drew a generation of scholars of race and poverty over a scientific cliff? What are the conditions for the formation and bursting of "conceptual speculative bubbles"? What is the role of think tanks, journalism, and politics in imposing "turnkey problematics" upon social researchers? What are the special quandaries posed by the naming of dispossessed and dishonored populations in scientific discourse and how can we reformulate the explosive question of "race" to avoid these troubles? Answering these questions constitutes an exacting exercise in epistemic reflexivity in the tradition of Bachelard, Canguilhem and Bourdieu, and it issues in a clarion call for social scientists to defend their intellectual autonomy against the encroachments of outside powers, be they state officials, the media, think tanks, or philanthropic organizations. Compact, meticulous and forcefully argued, this study in the politics of social science knowledge will be of great interest to students and scholars in sociology, anthropology, urban studies, ethnic studies, geography, intellectual history, the philosophy of science and public policy.
L'oeuvre multiple et complexe de Pierre Bourdieu a suscité, de par le monde, de très nombreuses interprétations et interpellations. C'est cet univers de discussions que Loïc Wacquant a reconstitué lors d'un séminaire tenu à l'Université de Chicago en 1987 puis au cours d'échanges serrés avec Pierre Bourdieu entre 1988 et 1991. Invitation à la sociologie réflexive livre les enseignements de ces échanges transatlantiques selon trois modalités complémentaires.Après une première partie exposant l'architecture conceptuelle et thématique des travaux de Pierre Bourdieu, Loïc Wacquant, au cours d'une interrogation méthodique nourrie de la lecture de l'oeuvre et de ses critiques, permet non seulement au sociologue de répondre aux objections qui lui ont été adressées, mais aussi de livrer, plus clairement que jamais, les fondements philosophiques et épistémologiques de sa démarche.
Poussé et porté par cette interrogation, Pierre Bourdieu est conduit à révéler jusqu'aux implications éthiques et civiques de son travail et à réfléchir sur ses effets sociaux.En présentant, dans la troisième partie, le préambule à son séminaire de recherche à l'École des hautes études en sciences sociales, Pierre Bourdieu nous fait entrer dans son atelier, ce laboratoire où s'élabore une oeuvre à laquelle ce livre constitue la meilleure introduction.
Increasingly the body is a possession that does not belong to us. It is bought and sold, bartered and stolen, marketed wholesale or in parts. The professions - especially reproductive medicine, transplant surgery, and bioethics but also journalism and other cultural specialists - have been pliant partners in this accelerating commodification of live and dead human organisms. Under the guise of healing or research, they have contributed to a new 'ethic of parts' for which the divisible body is severed from the self, torn from the social fabric, and thrust into commercial transactions -- as organs, secretions, reproductive capacities, and tissues -- responding to the dictates of an incipiently global marketplace.
Breaking with established approaches which prioritize the body as 'text', the chapters in this book examine not only images of the body-turned-merchandise but actually existing organisms considered at once as material entities, semi-magical tokens, symbolic vectors and founts of lived experience. The topics covered range from the cultural disposal and media treatment of corpses, the biopolitics of cells, sperm banks and eugenics, to the international trafficking of kidneys, the development of 'transplant tourism', to the idioms of corporeal exploitation among prizefighters as a limiting case of fleshly commodity.
This insightful and arresting volume combines perspectives from anthropology, law, medicine, and sociology to offer compelling analyses of the concrete ways in which the body is made into a commodity and how its marketization in turn remakes social relations and cultural meanings.
Sociologie réflexive est le premier titre de Pierre Bourdieu (1930-2002) qui paraît en Ukraine. Le grand sociologue français du 20e siècle y dialogue avec son élève et collègue Loïc Wacquant.
Pierre Bourdieu explique l'importance de ses concepts clés, répond aux critiques et attire particulièrement l'attention sur le besoin de réflexivité et de l'inscription de la théorie de la pratique intellectuelle dans une théorie plus large de la société.
Le livre est complété par des notes détaillées et une liste de références, ce qui rend cette publication indispensable aux universitaires, aux étudiants et à toute personne intéressée par les questions sociologiques, politiques, économiques, historiques et philosophiques.
Le livre est paru à Kyiv (Ukraine) en 2015.