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" Le récit débute à Nancy, par la rencontre entre sept élèves d'un lycée de province aux tempéraments bien différents, et Paul Bouteiller, jeune normalien admirateur de Kant et dévoué au parti radical, qui exerce sur eux une fascination croissante. Par son activisme politique (il agit en province pour le compte de Gambetta), Bouteiller obtient un poste d'enseignant dans un grand lycée de Paris, symbole de la réussite républicaine et sociale de l'époque selon Barrès. Dans une scène d'anthologie, il organise une parodie de vote parmi ses élèves sur la question de sa démission à Nancy. Enfin, il invite ceux d'entre ses élèves qui se rendraient quelque jour à Paris, à passer le voir : « Je vais vous quitter, la vie ne nous séparera pas ; je ne perdrai de vue aucun de vous ; je vous suivrai dans les carrières diverses où vous appelleront vos dons naturels, vos justes ambitions, et le choix des autorités légitimes. Vous cessez d'être mes élèves, vous devenez mes amis. Toujours je serai heureux si l'un de vous monte mon escalier. »
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MON CHER AMI, Ce volume , Sous l'oeil des Barbares, mis en vente depuis six semaines, était ignoré du public, et la plupart des professionnels le jugeaient incompréhensible et choquant, quand vous lui apportâtes votre autorité et voire amitié fraternelle. Vous m'en avez continué le bénéfice jusqu'à ce jour. Vous m'avez abrégé de quelques années le temps fort pénible où un écrivain se cherche un public. Peut-être aussi mon travail m'est-il devenu plus agréable à moi-même, grâce à cette courtoise et affectueuse compréhension par où vous négligez les imperfections de ces pages pour y souligner ce qu'elles comportent de tentatives intéressantes.
Ah! les chères journées entre autres que nous avons passées à Hyères! Comme vous écriviez Un coeur de femme, nous n'avions souci que du viveur Casal, de Poyanne, de la pliante madame de Tillière, puis aussi de la jeune Bérénice et de cet idiot de Charles Martin qui faisaient alors ma complaisance. Ils nous amusaient parfaitement. J'ajoute que vous avez un art incomparable pour organiser la vie dans ses moindres détails, c'est-à-dire donner de l'intelligence aux hôteliers et de la timidité aux importuns; à ce point que pas une fois, en me mettant à table, dans ce temps-là, il ne me vint à l'esprit une réflexion qui m'attriste en voyage, à savoir qu'étant donné le grand nombre de bêtes qu'on rencontre à travers le monde, il est bien pénible que seuls, ou à peu près, le veau, le boeuf et le mouton soient comestibles.
Et c'est ainsi, mon cher Bourget, que vous m'avez procuré le plaisir le plus doux pour un jeune esprit, qui est d'aimer celui qu'il admire. Si j'ajoute que vous êtes le penseur de ce temps ayant la vue la plus nette des méthodes convenables à chaque espèce d'esprit et le goût le plus vif pour en discuter, on s'expliquera surabondamment que je prenne la liberté de vous adresser ce petit travail, ou je me suis proposé d'examiner quelques questions que soulève cette théorie de la culture du Moi développée dans Sous l'oeil des Barbares, Un homme libre et le Jardin de Bérénice.