« Qu'est-ce qui pousse un jeune homme de constitution ordinaire et d'éducation classique à s'asseoir un jour au guidon d'une motocyclette et à ne jamais plus rien désirer d'autre que d'avaler les kilomètres, torse immobile, regard perdu, la poignée des gaz enfoncée - à fond, vers l'horizon?
Il y a dans le voyage à moto une réminiscence des vieilles chevauchées que la modernité, et ses lois cadastrales, a interdit. On trouve à peu de frais, assis sur la selle d'une bécane un écho lointain de ces ruées sauvages où l'on cravachait sa monture, foutait une torgnole aux rafales et déclarait la guerre à tout le monde selon le bon vieux principe des Comanches.
Quand Jack Kerouac et sa bande de beatniks partirent rouler (en voiture) sur les routes de l'Amérique ils poursuivaient le même objectif : calmer le feu intérieur et regarder vaguement défiler les cactus en ingurgitant des choses étranges. C'est un peu cela que nous avons cherché, plus sagement peut-être, pendant dix années juchés sur nos motos, au Bouthan, au Baïkal, au Rajasthan, au Kirghizistan ou au Chili. Nous avons demandé au vent et à la poussière, au ronronnement des pistons et à la courbe des virages de nous propulser dans un sentiment de liberté. Le vent se lève, on met les gaz, on se tient là, seul, l'oeil fixé sur les bandes blanches et le monde semble soudain en ordre parce que la route file.
Autre chose : une fois qu'on a placé la moto sur sa béquille on a beaucoup plus de chance de nouer une conversation avec les gens de rencontre. Il faut toujours mieux avoir l'air de sortir du vent que d'une automobile. »
S. Tesson a parcouru le chemin de ceux qui ont fui le goulag ou l'oppression soviétique à partir des années 1920 jusqu'à l'effondrement de l'URSS. Il s'est notamment inspiré pour son itinéraire de celui emprunté Slavomir Rawicz et décrit dans«A marche forcée».
« Nous décampâmes. Nous partîmes vers les horizons, avec une fièvre dont nous pensions que l'accumulation de kilomètres serait l'antidote alors qu'elle s'en révéla l'excitant. Mais le mouvement apaisait quand même quelque chose. Il atténuait notre mélancolie de n'avoir rien fait de nos vies, d'être né trop tard et d'avoir tout raté. Nous n'étions pas des lansquenets, nous avions manqué l'embarquement sur les galions pirates, nous ne rejoindrions jamais la forêt de Sherwood. Que restait-il ? Les mobs, mon pote. Nous avons alors roulé sur la Terre. En Inde, en Russie, en Finlande, au Bhoutan, en Mongolie et en Sibérie, en Chine, en Serbie, au Chili, en Asie centrale et au Népal, à Madagascar et en Asie du sud-est. » L'aventure comme art de vivre. Embarquez avec Sylvain Tesson et Thomas Goisque pour vingt-cinq ans de chevauchées autour du monde : une rafale d'oxygène et de liberté !
Elle se tient là, couchée au pied de la falaise, présente et invisible, discrètement dominatrice.
Sa robe est mouchetée d'ivoire et de poussière.
Taches de nacre, ombres d'obsidienne, larmes d'or.
Le ciel et la terre, le jour et la nuit sont fondus dans son pelage.
On braque la lunette sur son corps mais l'oeil met un moment à le discerner.
L'esprit tarde à accepter ce qu'il n'attendait pas.
Le regard peine à voir ce qu'il ne connaît pas.
Notre raison, soudain, comprend que la bête se tient là, postée de pleine face.
Le paysage, par une étrange illusion d'optique, semble se résorber tout entier dans son corps.
Ce n'est plus la panthère qui est camouflée dans le paysage, mais le monde qui s'est incorporé à elle.
Sylvain Tesson.
Le photographe Vincent Munier nous entraîne sur les traces de la panthère des neiges. La trouver est un graal pour bien des voyageurs. Sa quête ensorcelle : il faut se briser les yeux sur la roche, sur la neige, sur le dos de chaque montagne pour espérer l'apercevoir. Et rencontrer, avec un peu de chance, les autres habitants du majestueux plateau tibétain : minuscules pikas, grands rapaces, renards du Tibet, rares yacks sauvages, étonnants chats de Pallas, troupeaux d'ânes kiangs...
Sylvain Tesson l'a accompagné dans son dernier périple et lui prête sa plume d'écrivain voyageur pour la première fois.
Moscou-Paris en side-car : une folle épopée de 4 000 km sur les traces de Napoléon...
Octobre 1812, Napoléon entre dans Moscou. Les Russes ont mis le feu à la ville, bientôt elle sera réduite à un tas de cendres. L'Empereur tergiverse, se décide à rebrousser chemin. Il donne le coup d'envoi de la Retraite de Russie, une page d'Histoire passée à la légende pour la somme de ses souffrances et de ses actes héroïques.
Deux cents ans plus tard, Sylvain Tesson, accompagné de quatre amis, décide de répéter l'itinéraire de la Retraite. Juchés sur des side-cars russes de marque Oural, ils rallieront Paris depuis Moscou, guidés par les récits des spectres de 1812. Quatre mille kilomètres à la mémoire des soldats de la Grande Armée. Une équipée sauvage pour saluer les fantômes de l'Histoire, à travers les plaines blanches.
Cette édition du récit de Sylvain Tesson est illustrée de près de 100 photographies inédites rapportées par Thomas Goisque et immortalisant les moments-dés du périple.