PRIX MEDICIS ETRANGER 2020
Muni d'un carnet, d'une paire de ciseaux et de son smartphone, Antonio Muñoz Molina marche dans Paris, New York, Madrid, Lisbonne. Au fil de ses pérégrinations, des silhouettes surgissent tandis que d'autres s'esquivent et, soudain, au détour d'une ruelle, apparaissent Baudelaire, Edgar Allan Poe ou Fernando Pessoa.
Les pages s'écoulent au rythme de la vie, tel un immense collage de tout ce que le promeneur voit et entend : affiches, prospectus, bruits omniprésents des conversations, vacarme de la rue. Animé par la tentation de tout écrire - ce qu'il a vécu, écouté, rêvé, souffert, aimé ou lu -, Antonio Muñoz Molina laisse courir la mine de son crayon et, sublimant les rebuts de notre civilisation avide et destructrice, compose « le grand poème de ce siècle ».
D'une voix profondément ancrée dans le moment présent, cet éloge érudit de la flânerie nous invite à regarder et à écouter d'une autre façon, et à célébrer la variété du monde.
Traduit de l'espagnol par Isabelle Gugnon
À propos de l'oeuvre d'Antonio Muñoz Molina :
« Un équilibriste au sommet de son art. » Le Journal du Dimanche
« L'auteur démontre avec justesse le pouvoir de la littérature, de l'imaginaire, seul instrument valable pour reconstruire une vie. » Le Nouveau Magazine littéraire
« Antonio Muñoz Molina subjugue en écrivant comme les musiciens peuvent improviser : à coups d'envolées lyriques et d'embardées inattendues, mais avec une précision à couper le souffle. » Le Point
À la fin de 1936, Ignacio Abel, architecte espagnol de renom, progressiste et républicain, monte l'escalier de la gare de Pennsylvanie, à New York, après un périple mouvementé depuis Madrid où la guerre civile a éclaté. Hanté par les récriminations de sa femme, Adela, et taraudé par le sort incertain de ses deux jeunes enfants, Miguel et Lita, il cherche Judith Biely, sa maîtresse américaine. L'auteur le regarde prendre le train qui doit le conduire dans une petite ville au bord de l'Hudson, Reinheberg, et reconstruit au cours d'un époustouflant va-et-vient dans le temps la vie d'Ignacio Abel, fils de maçon, devenu architecte à force de sacrifices, marié à une fille de la bourgeoisie madrilène rétrograde et catholique, déchiré par sa passion amoureuse et par la violence des événements politiques. Au long de ces mille pages d'amour et de guerre, les personnages de fiction mêlent leur vie à celle des hommes politiques et des écrivains de l'époque. Dans ce chef-d'œuvre intimiste et charnel, Antonio Muñoz Molina fouille avec une lucidité admirable et bouleversante au plus profond de la matière humaine.
Traduit de l'espagnol par Philippe Bataillon
Né à Ubeda, espagne, en 1956, Antonio Munoz Molina est l'un des plus grands écrivains de langue espagnole. Son oeuvre romanesque, réunie au éditions du Seuil, a reçu de nombreux prix littéraires en Espagne, dont le Prix national de littérature. et en France le Prix Femina étranger. Il est membre de la Real Academia Espanola.
Séfarade, c'est la patrie de tous les accusés, exilés, bannis, chassés de leur quotidien, de leur maison, de leur terre et qui, où qu'ils se trouvent, sont à jamais des étrangers.
Séfarade, c'est la patrie de la mémoire, celle des disparus, morts ou vivants, personnages réels ou imaginaires réunis par la fraternité et la solidarité d'un écrivain.
Séfarade, ce sont dix-sept chapitres racontant chacun une histoire différente, toutes traversées par des motifs, phrases, personnages qui assemblent un discours dont le thème central est la persécution.
À travers la voix émouvante et forte d'Antonio Muñoz Molina résonnent celles de Primo Levi, Franz Kafka et Milena Jesenska, Willi Münzenberg, Evguénia Guinzbourg, Margarete Buber-Neumann, mais aussi l'attente d'une femme qui ne revit jamais son père, les nostalgies de Mateo le cordonnier, la folie amoureuse d'une nonne ou encore le souvenir d'une rescapée des geôles argentines. Autant d'êtres détruits au plus intime d'eux-mêmes par l'Histoire.
Ce livre magnifique brise les limites de la fiction en même temps qu'il les transcende. Et comme toujours sous la plume de ce grand écrivain espagnol, matière humaine et matière narrative se fondent en des pages d'une beauté inouïe.
Le 4 avril 1968, James Earl Ray assassine Martin Luther King à Memphis et prend la fuite. Entre le 8 et le 17 mai de la même année, il se cache à Lisbonne où, en 2013, Antonio Muñoz Molina part sur ses traces et se remémore son premier voyage dans la capitale portugaise, alors qu'il essayait d'écrire son deuxième roman, L'Hiver à Lisbonne, une histoire d'amour sur fond de musique de jazz et de roman noir.
La fascinante reconstruction des jours de l'assassin croise alors le propre passé de l'auteur, et les deux récits alternent, avec Lisbonne pour épicentre. L'un, autobiographique, relate, sur un mode très personnel et intime, l'apprentissage de la vie et des mécanismes du roman ; l'autre, à la manière d'un thriller, témoigne de ce qu'est la création romanesque, quand, fondée sur le réel, elle va au-delà des faits pour pénétrer dans la conscience des personnages. Pour entrer dans le mystère de l'univers mental de l'assassin, Antonio Muñoz Molina imagine ses obsessions, assiste à ses déambulations nocturnes dans les bars et les hôtels de passe, le suit pas à pas aux États-Unis, au Canada, au Portugal, et revient à Memphis afin de comprendre pourquoi James Earl Ray, certain que l'on peut impunément tuer un Noir militant des droits civiques, appuie le canon de son fusil sur la fenêtre des toilettes d'une pension misérable et exécute Martin Luther King sur le balcon du Lorraine motel.
Traduit de l'espagnol par Philippe Bataillon
Antonio Muñoz Molina, né à Úbeda en 1956, est reconnu dans le monde entier comme l'un des plus grands écrivains de langue espagnole. Il est l'auteur d'une quinzaine de romans, de deux recueils de nouvelles et de nombreux essais et écrits journalistiques. Il a reçu de nombreux prix, dont le prix Jérusalem et le prix Príncipe de Asturias pour l'ensemble de son œuvre.
Dans une chambre d'hôtel de Madrid, Santiago Biralbo, pianiste de jazz, raconte par bribes à un ami l'histoire de son amour pour Lucrecia, commencée cinq ans plus tôt à Saint-Sébastien, au Lady Bird. Quinze jours de passion fulgurante, le brusque départ de Lucrecia pour Berlin, quelques lettres, et le silence. Un vide que ne parvient même pas combler la musique, car au Lady Bird Santiago Biralbo avait eu la révélation qu'il ne pourrait désormais jouer du piano que pour être écouté et désiré par elle, l'aimée disparue dans les brumes du nord.
Puis la réapparition soudaine de Lucrecia, mêlée au vol d'un tableau, un accident - peut-être un meurtre -, une passion qui s'achève à Lisbonne dans une reconnaissance mutuelle, et un homme qui surmonte la solitude finale dans la certitude obscure qu'il n'y a ni souffrance ni bonheur mais un destin inscrit dans la douceur sauvage et âpre de la musique, et qu'il importe peu, dès lors, d'être mort ou vivant.
L'Hiver à Lisbonne, hommage d'Antonio Muñoz Molina aux films noirs américains et au jazz, publié aujourd'hui dans une nouvelle traduction, est aussi une des plus belles histoires d'amour de la littérature contemporaine.
Dans une petite ville du sud de l'Andalousie battue par la pluie et le vent, une fillette est retrouvée morte sur le talus d'un parc. Couverte de terre, elle ne porte plus que ses socquettes, et sa culotte a été enfoncée dans sa bouche pour l'asphyxier.
L'hiver et la peur tombent sur la ville tandis que se font entendre, comme une trame en continuelle expansion, les voix des personnages liés entre eux par des bribes de passé et l'horreur d'une cruauté gratuite. L'inspecteur, un homme muté du pays Basque, miné de l'intérieur par la violence terroriste, obsédé par la recherche de l'assassin comme si d'elle dépendait son propre salut. Susana Grey, l'institutrice, dont la sensibilité, l'ouverture sur le monde et les autres vont bouleverser la vie de l'inspecteur. Le père Orduña, ancien prêtre ouvrier, persuadé que les yeux sont le reflet de l'âme et que ceux de l'assassin sont vides. Paula, la seconde victime, elle aussi retrouvée sur le talus, mais vivante à force de courage et de ténacité, protégée par la tendresse de son père. Le médecin légiste, dissimulant sa solitude et son désenchantement sous sa conscience professionnelle et sa tendresse pour l'enfance. L'assassin enfin, personnage névrosé et énigmatique, ordinaire et ignoble, qui ne sait vivre que dans la haine et la soumission du plus faible. Témoin symbolique de cet entrelacs d'horreur et d'humanité, la clarté lunaire tantôt illumine l'amour rédempteur de l'institutrice et de l'inspecteur, tantôt pousse l'assassin au plus noir de lui-même.
On ne sort pas indemne de ce livre dense, qui s'appuie sur une prose précise et une construction sans faille, animé d'un souffle poétique admirable et qui s'enfonce, entre passé et présent, dans l'obscure et lumineuse manière humaine.
Pleine Lune révèle la profonde cohérence du monde narratif d'Antonio Muñoz Molina, l'un des plus grands écrivains de notre temps.
Dans un appartement de New York, pendant la guerre du Golfe, Manuel et Nadia s'émerveillent d'être devenus amants. Dix-huit ans auparavant, ils s'étaient croisés sans se voir, chacun dans sa propre histoire, à Mágina, une petite ville d'Espagne, berceau de leurs familles. Et voici que par le dialogue amoureux, ils exhument un passé qui, depuis plus d'un siècle, complotait leur rencontre. Une foule de voix et de visages oubliés accompagne en effet la fête sensuelle de Nadia, qui a vécu l'exil aux Etats-Unis avec son père, et de Manuel, qui a choisi de s'arracher à l'Espagne, de perdre la mémoire.
Avec Le Royaume des voix, qui lui a valu le prix Planeta en 1992, Antonio Muñoz Molina poursuit magistralement un cycle romanesque de la mémoire inauguré par son premier livre, Beatus ille.
Membre d'un réseau antifranquiste, exilé en Angleterre, Darman a pour mission de se rendre clandestinement à Madrid pour éliminer un traître. Ce n'est pas la première fois qu'il doit accomplir ce genre de travail. Vingt ans auparavant, il avait été chargé d'exécuter un de ses amis qui collaborait avec la police de Franco.
Un cabaret interlope, une salle de cinéma désaffectée, un vieil entrepôt servent de décor fantomatique à une traque crépusculaire dans un Madrid où brusquement le cours du temps s'inverse et contraint Dorman à effectuer une relecture périlleuse de son propre passé. Les traîtres sont-ils ceux que l'on désigne comme tels ou, plus machiavéliques, continuent-ils à ourdir dans les souterrains de la ville et les coulisses de l'histoire les maléfices de la trahison et du crime ?
Sur fond de clandestinité et de mensonge, Antonio Muñoz Molina a écrit un thriller au lyrisme flamboyant, un diamant noir incrusté dans la chair vive de la mémoire.
Mario, fonctionnaire dans une petite ville de province, partage sa vie entre son travail et sa passion pour sa femme, Blanca. C'est un jeune homme simple, attaché aux valeurs traditionnelles du travail et du foyer, et si Blanca le fascine à ce point c'est qu'elle représente le côté exquis de la vie, l'insouciance bourgeoise, la fantaisie. Mais peu à peu, Mario sent une menace inquiétante peser sur son couple. Blanca, qu'il a sauvée de la déchéance où s'enfoncent parfois les jeunes filles en quête de sensations fortes, s'évade, échaffaude des projets qu'il ne comprend pas, lui échappe, et entre ces deux êtres que tout oppose l'incompréhension et la souffrance s'installent.
L'amour peut-il survivre à sa propre disparition ? La réponse désespérée d'Antonio Muñoz Molina dans ce court roman circulaire est une véritable leçon de stratégie littéraire et de maîtrise absolue du style, bref et magnifique hommage à Flaubert.
Deux hommes, qui n'ont en commun que leur nationalité espagnole, se rencontrent par hasard dans une salle de transit de l'aéroport de Pittsburgh sur lequel s'abat une tempête de neige. Ils ne se connaissent pas et ne se reverront jamais. L'un, Claudio, un professeur de littérature qui se rend à Buenos Aires pour y donner une conférence sur un sonnet de Borges, écoute alors l'histoire secrète et étrange que l'autre, Marcelo, un homme d'affaires madrilène, a vécue quelques années auparavant dans un hôtel de la capitale argentine.
Puis les voyageurs se séparent et Claudio découvrira, dans ce même hôtel où a séjourné Marcelo, que l'ordre quotidien peut à tout moment être bouleversé par l'irruption du fantastique et qu'entre le réel et l'irréel la frontière est si ténue qu'elle est le plus souvent imperceptible.
Antonio Muñoz Molina, en revendiquant ici les récits d'Henry James, Thomas Mann et Juan Carlos Onetti, prouve une fois encore que le roman court, lorsqu'il atteint la perfection, brille d'incomparables feux.
Un roman aussi lumineux qu’inquiétant, par le prix Médicis étranger 2020.
À Lisbonne, un homme attend la femme qu’il aime. Il a quitté New York avant elle, pour arranger l’appartement qu’ils ont acheté. Il profite de la douceur du climat et de la tranquillité du quartier. Penser au moindre détail, imaginer les rituels qui rythmeront leur nouvelle vie : tout est une source infinie de plaisir. Pourtant, un sentiment diffus l’accompagne, une forme de confusion qu’il ne parvient pas à éclaircir. Est-ce la similarité entre les deux villes, les deux appartements ? La présence d’une menace sourde impossible à identifier ?
Admirable styliste, Antonio Muñoz Molina est aussi un maître de la narration. Dans ce roman à la simplicité trompeuse, il nous entraîne à travers les méandres de la mémoire, de la raison et de la peur. Progressivement et très subtilement, il met à nu la fragilité de tout ce que nous nous sommes si soigneusement raconté sur nos vies.
Traduit de l’espagnol par Isabelle Gugnon
« Un roman intense à lire d’une seule traite. » El País
« Un thriller psychologique impressionnant. » La Vanguardia
En 1974, un jeune provincial venu étudié à Madrid fait partie d'un complot rocambolesque dsetiné à renverser le régime franquiste. La capitale espagnole est le reflet de la dictature finissante : grise et lugubre, comme hors du temps, plongée dans un interminable ennui.
La conjuration ne changera pas le destin de l'Espagne et, au bout du tunnel, la révolution n'aura pas lieu. Les grandes espérances se soldent par un échec ou, ce qui est pire peut-être, par un sentiment de défaite intérieure, que seul adoucit un secret qui n'est pas celui qu'on croit.
Éducation sentimentale ironique et nostalgique, Le Sceau du secret confirme Antonio Muñoz Molina comme le narrateur le plus important de la jeune génération espagnole.
" Je m'appelle J-54. " A l'automne 1979, alors que l'Espagne commence tout juste à réapprendre à vivre en démocratie, un jeune homme qui rêve de devenir écrivain part au service militaire. Envoyé à Saint-Sébastien, il entreprend en train un voyage lugubre qui n'est plus que le prélude à un long cauchemar.
" Les bleus, vous allez mourir ! " C'est par ces mots que dans les casernes on accueillait alors les jeunes conscrits qui, au fil des mois, allaient apprendre à oublier jusqu'à leur nom et leur condition d'âtre humain. Humiliations, brimades, culte de la virilité, mépris des faibles et des femmes, l'armée savait qu'en terrorisant ses recrues elle inoculait dans les veines de toute une jeunesse l'implacable ordre fasciste.
Peu d'œuvres ont atteint une telle force de conviction dans la description de la brutalité, de l'absurde, de la monotonie déprimante des casernes, peu d'ouvrages ont dénoncé avec autant de fulgurance l'apprentissage obligatoire de la violence et de la cruauté ordinaires. Et il fallait toute la puissance d'évocation d'Antonio Muñoz Molina pour faire de ce réquisitoire contre l'intolérance un récit autobiographique bouleversant, une œuvre littéraire majeure.
Un homme entraîné, à la suite d'un mystérieux coup de fil, dans une liaison improbable : un fleuve étrange qui marque la frontière de l'oubli ; un employé envoûté par les rêves d'amour que suscite en lui une jeune fille ; l'étrange relation entre un professeur et un vendeur d'encyclopédies ; un voyage au pays irréel de la mémoire. A tout moment les rêves et les fantasmes se glissent dans les interstices de la vie quotidienne et, pour peu que nous soyons consentants, nous projettent dans l'autre monde, subvertissant la réalité, nous révélant le mystère des êtres et des choses.
Grand admirateur de Poe et de Cortázar, Antonio Muñoz Molina nous entraîne ici dans d'extraordinaires histoires de tous les jours, tantôt intimistes ou mystérieuses, tantôt érotiques ou policières, dont la tension extrême tient en haleine le lecteur précipité malgré lui dans une fin toujours surprenante.
On retrouvera dans ces douze nouvelles toute la merveilleuse richesse narrative de ce grand écrivain et, surtout, sa manière si naturelle de plonger, en de longues phrases coulées, jusqu'au plus profond de la matière humaine.