«L'Ukraine est vue de Moscou comme la pièce essentielle d'un dispositif de protection à contrôler ou, au mieux, à neutraliser.»Michel FoucherArpentant les contrées d'Europe médiane et orientale depuis une trentaine d'années, le géographe et diplomate Michel Foucher, spécialiste des frontières géopolitiques, analyse le confit russo-ukrainien en mettant au jour la cartographie mentale - historique, politique, territoriale et identitaire - du duel qui oppose les deux nations suite à l'agression fratricide lancée par Vladimir Poutine. Cette cartographie entre Baltique et mer Noire, étendue par ses causes et ses effets à l'Europe entière, porte l'empreinte d'une confrontation entre un passé qui ne veut pas passer - celui de la Russie, comme puissance autocratique et impériale - à un futur qui ne semble devoir naître que dans la résistance et la souffrance, celui de l'Ukraine comme État-nation souverain «inclinant vers le monde euroatlantique» (Havel). Un duel qui affecte gravement l'état du monde et dont le déroulement et l'issue nous concernent tous.
Après l'effondrement soviétique et l'indépendance de ses composantes, les élites russes n'ont eu de cesse de vouloir rassembler le «?monde russe?». Ce fut la politique dite des compatriotes, puis le soutien aux séparatismes périphériques. Elle a été théorisée par le président russe dans un long texte soutenant que Russes et Ukrainiens sont un même peuple. L'agression militaire du 24 février 2022, étape suivante de cette analyse, ne pouvait que se heurter à la résistance de la nation ukrainienne?!
L'issue de la guerre dépend du rapport des forces sur les divers terrains, mais aussi des objectifs du Kremlin. Plusieurs -scénarios sont analysés par Michel Foucher dans cet ouvrage, qui nous invite également à comprendre les effets de cette guerre mondialisée où s'exacerbe, en Russie comme chez son soutien chinois, le ressentiment contre un Occident provisoirement consolidé sous la direction des États-Unis. Géographe, essayiste et ancien ambassadeur. Michel Foucher est membre du conseil d'orientation du Cycle des hautes études européennes (Institut national du service public). Ses derniers ouvrages parus sont Arpenter le monde. Mémoires d'un géographe politique (Robert Laffont, 2021) et Ukraine-Russie. La carte mentale du duel (Gallimard, Tract n°?38, 2022).
La diffusion rapide du virus SARS-CoV2 nous a récemment rappelé la fonction protectrice de la frontière. Mais au-delà de cette situation pandémique, comment interpréter le retour des frontières constaté depuis quelques années ? Contrairement à ce que l'on croit souvent, cette réaffirmation des frontières, quand elles ne sont pas réduites à des murs mais envisagées en tant que limites, est une bonne nouvelle. Car une frontière a une histoire, c'est une institution issue de conflits et de traités, de négociations et de décisions. Abolir les frontières, c'est faire disparaître les États. Or, un monde sans frontières est un monde barbare, ce que l'horreur daechite nous avait rappelé.
Penser l'Europe à l'échelle mondiale invite aussi bien à dessiner les limites variables de l'Union qu'à observer son influence sur les grands enjeux planétaires : valeurs démocratiques, droits humains, régulation du marché, neutralité climatique, etc. C'est aussi montrer les dépendances, interactions et rivalités qui existent entre cet ensemble original et les autres régions du monde. Un volume pour mieux comprendre la singularité de l'Union européenne.
Riche de ses voyages dans quelque cent vingt-cinq pays - les deux tiers des États membres des Nations unies -, Michel Foucher explore ici les voies d'une géographie vécue comme active et engagée : en chercheur et cartographe, consultant et diplomate, analyste et témoin impliqué.
Enquêtes de terrain et entretiens forment, pour ce grand spécialiste des frontières, la matière première de la géographie - une géographie débouchant sur une géopolitique appliquée. Car Michel Foucher en est convaincu : il est souvent possible d'anticiper les tensions si l'on donne aux représentations spatiales leur juste place dans l'imaginaire des peuples et des acteurs publics.
Après une longue carrière, le temps était venu pour lui de procéder à ce que les officiers de l'armée de terre nomment un « retour d'expérience », ou « retex » - analyse sans concession des succès et des échecs. Confrontant les passés étudiés aux présents observés, ces Mémoires dessinent une carte passionnante des enjeux du monde contemporain.
Le principe d'intangibilité des frontières a été adopté par les chefs d'État africains en 1964, au moment des indépendances. Depuis, les États se sont appropriés cet héritage d'une période coloniale. Il est donc temps d'en finir avec le mythe de cicatrices coloniales, tracés artificiels qui seraient responsables des conflits actuels et du mal-développement. Les frontières d'Afrique sont bel et bien devenues des frontières africaines. Et quoique parfois encore imprécises ou sources d'insécurité, elles fonctionnent néanmoins comme une ressource et comme autant d'interfaces utilisées par les réseaux marchands, acteurs d'une mondialisation par le bas.
On a un temps pensé que la mondialisation, en plus d'aplatir la terre, abolirait les frontières.
Or, depuis une vingtaine d'années, près de 30 000 kilomètres de frontières nouvelles ont été tracés rien qu'en Europe et en Asie centrale, et autant ont fait l'objet d'accords internationaux. A travers un tour du monde géopolitique, Michel Foucher montre que les conflits les plus graves portent sur la délimitation des territoires : entre Israël et ses voisins ; entre le Pakistan, l'Inde et l'Afghanistan.
Il observe l'édification de murs et de barrières en Amérique du Nord, au Proche-Orient, en Asie du Sud. Partout, caméras, clôtures et patrouilles prolifèrent. La "sécurité" est devenue le corollaire de la mondialisation. Les frontières sont devenues un marché florissant. Mais jusqu'où ce processus de morcellement du territoire peut-il aller ? C'est la question posée par cet ouvrage qui, pour la première fois et grâce à de multiples analyses de terrain, offre une vision planétaire de ce phénomène inquiétant.
Les prochaines élections européennes seront -enfin !- passionnantes : l'Europe et les pays européens vont y jouer leur avenir.
Dans cet ouvrage, Michel Foucher, géographe et diplomate, met en perspective le projet européen et plaide pour une Europe puissance, osant enfin s'adresser fièrement au monde.
Du Brexit à l'élection de Donald Trump à la tête des États-Unis, de l'agression russe contre l'Ukraine à l'appétit de Pékin en mer de Chine, de la crispation autour de la question des migrants aux échecs de la diplomatie au Proche-Orient : l'actualité internationale secoue l'ordre mondial et bouscule les États-nations.
Ces tensions politiques multiformes sont-elles le signe d'une revanche du national ? Assiste-t-on à une réaffirmation des frontières de la part des États comme rempart de protection ? Ou bien, les dynamiques de la mondialisation signent-elles au contraire l'érosion inéluctable des souverainetés ? Observe-t-on le « retour des frontières », ou bien au contraire la « fin des territoires » ? Après le temps néo-conservateur, subit-on la « fièvre néo-nationaliste » ?
Deux grands penseurs contemporains, Bertrand Badie, politiste et Michel Foucher, géographe, confrontent leurs points de vue sur ces questions centrales pour décrypter l'évolution de notre monde et ses dérives possibles.
Entretiens avec Gaïdz Minassian.
La liberté d'action des sociétés se conforte lorsqu'elles se situent avec lucidité et confiance dans leur histoire et dans leur géographie. Les femmes et les hommes qui sont la Métropole Européenne de Lille, qui vivent, circulent et travaillent dans les quatre-vingt dix communes qui la composent, s'inscrivent dans une histoire déjà longue, faite de progrès et de transitions, de rebonds et de projets. Elles et ils résident et agissent dans un lieu privilégié, actif carrefour de l'Europe du Nord-Ouest, qui démultiplie les atouts de l'appartenance à l'Union européenne, premier marché et plus vaste espace démocratique du monde.
Elles et ils ont su, dans tous les domaines de la vie collective - économiques et technologiques, éducatifs et culturels, associatifs et sportifs - respirer l'air du grand large et assumer leur ancrage européen, comme en témoigna le succès durable et populaire de l'année 2004 où Lille se vécut pleinement « capitale européenne de la culture ». Ce fut le point de départ d'un nouvel élan qui confirma la place de la métropole sur la carte de l'Europe.
Ce livre-atlas veut offrir au lecteur curieux une preuve par les cartes de la réalité, de l'ampleur et de la profondeur des présences et des ouvertures européennes et internationales des acteurs de la Métropole Européenne de Lille, ainsi que de celles et ceux attirés par ce qu'elle offre : attraction et diffusion sont les clés de l'influence. En 2020, le « design », art de la création et de l'imagination, lui conférera plus de visibilité sur la carte du monde. C'est l'enjeu des cinquante prochaines années.
Cet ouvrage dresse le portrait de la langue française et de la francophonie dans le monde. La langue française, est vivante, mouvante ; elle appartient d'abord à ceux qui la parlent, avant de s'incarner à travers la dimension géopolitique et institutionnelle de la francophonie. L'auteur établit justement une distinction entre la francophonie ''officielle '' aux moyens et à l'influence actuellement en berne et la recomposition actuelle d'un monde francophone constitué de nouveaux locuteurs (langue, culture, économie). Il pointe notamment les dénombrements incertains (300 millions de francophones suivant l'OIF en 2019; de 500 à 700 millions en 2050 ? ), l'insuffisance ou l'inadaptation des efforts publics pour la formation des enseignants dans les bassins démographiques en croissance (Afrique). En revanche, il fait l'éloge des francophonies , avec un « petit f », celles d'une langue vivante et diversifiée tout en gardant sa norme originelle, celle des littératures-monde déjà pointées par JM Le Clézio et soulignées par la création d'une chaire au Collège de France, celles des apprenants et des nouveaux locuteurs, plus nombreux qu'en France même, celles enfin des efforts de francisation des termes anglo-américains envahissants. Car le premier chantier de la promotion de la langue française commence en France, où sa pratique quotidienne recule sous l'effet de paresses, de dérives et de règles non respectées.
Michel Foucher s'attache également à cartographier ce que font certains acteurs de la francophonie, du Canada à la Suisse, en passant par le Maroc ou le Sénégal, pour présenter un monde polychrome. Il conclut par l'examen de scenarii d'évolution des mondes francophones.
Une série de cartes, de portraits et de rencontres composent un panorama actualisé de la francophonie à travers le monde.
Le Château de La Roche-Guyon présente du 19 mai au 28 novembre 2021 l'exposition Frontières, entre histoires et géographies. Son commissariat est assuré par Michel Foucher, géographe, diplomate et essayiste, titulaire de la chaire de géopolitique appliquée au Collège d'études mondiales (Fondation Maison des Sciences de l'Homme) depuis 2013. Cette exposition est la pierre angulaire d'une Saison thématique intitulée « Frontières ». Situé aux confi ns de l'ancien duché de Normandie et du royaume de France, sur une limite marquée par la rivière Epte il y a 1 110 ans, et surplombant la Seine, voie de passage longtemps menaçante, le château de La Roche-Guyon se prête à merveille à l'exploration de cette question.
À partir de l'échelle locale visible en Val d'Oise et de l'ancienne frontière de l'Epte, encore présente sur les cartes, se déroule l'histoire de la formation des frontières françaises et se décline la géographie de ces lignes imaginaires. On découvre comment la Manche, une mer pour deux royaumes, frontière naturelle par excellence, au moins en apparence, fut d'abord une zone de rivalités séculaires, avant de se muer en interface active et fréquentée. On s'interroge sur l'Europe, vieux continent aux limites récentes, on rappelle l'histoire de la gestion de ses frontières par l'Union européenne et on s'interroge sur la façon dont ses habitants les vivent. Se dessinent les enjeux du contrôle des mobilités, avec l'invention du passeport, ceux des flux migratoires - la frontière protège l'exilé et son au-delà attire le jeune migrant en quête d'un sort meilleur. On représente les moyens de l'échange, l'actualité autour des frontières avec la crise sanitaire suite à la pandémie de Covid-19 Bien évidemment, l'internet sans frontières, les datacentres et les câbles sous-marins, nouvelles artères de la planète, sont évoqués.La mise en vis-à-vis photographique des murs qui séparent et des ponts qui relient off re l'occasion d'une réflexion à la fois esthétique et éthique sur le sens des limites dans notre monde contemporain. On met en évidence les tensions autour des frontières, sur mer et sur terre, y compris sur les cols de l'Himalaya, entre Inde et Chine.
Enfin, des images satellites des frontières dans le monde seront l'occasion de s'évader et de rêver les frontières.D'ailleurs, elles inspirent. Les représentations de frontières par des artistes tels que Monet, Turner, Klee, Ernest Pignon-Ernest ou encore Youcef Korichi confi rment la diversité de ces influences.
Depuis que le monde est monde, la coutume, la négociation, la guerre, la nature (moins souvent qu'on ne le croit) ont tracé des limites entre les groupes humains. Les frontières sont, ainsi, le produit des rapports de forces politiques tels que l'histoire les a façonnés dans l'espace.Dans sa première version, parue en 1988, le présent ouvrage, s'il passionna, surprit, intrigua: les géographes traceurs de frontières n'existaient plus, et la guerre froide avait figé pour un temps indéterminé les frontières inter-étatiques dans le monde. Pourquoi diable parler d'un phénomène si obsolète que les Douze venaient de décider de sa suppression? Et soudain, à l'automne de 1989, on vit tomber le mur de Berlin, se lever le Rideau de fer, et s'imposer la ligne Oder-Neisse... La très ancienne ligne de fracture entre l'Europe catholique (ou protestante) et l'Europe marquée par Byzance a relégué aux oubliettes de l'Histoire les limites issues du système de Yalta-Potsdam. La fin de l'ordre politique de Yalta allait-elle déboucher sur la remise en cause périlleuse de l'ordre territorial de Versailles? Dans le même temps, l'URSS se dissociait, la Yougoslavie entrait en crise, les frontières internes de l'Afrique du Sud s'estompaient avec la fin de l'apartheid, le Yémen se réunifiait, l'Irak tenait pour nulle et non avenue une frontière reconnue par la communauté des nations. Qui avait alors lu Michel Foucher savait que toutes ces questions _ et d'autres encore, dans toutes les régions du monde _ n'étaient pas closes, que tout changement dans les relations internationales se concrétiserait d'abord sur le terrain des fronts et des frontières.Validé par l'Histoire, ce livre, véritablement pionnier, reparaît aujourd'hui _ entièrement refondu et enrichi de nombreuses cartes. Sa lucidité et sa force de persuasion se sont accrues au centuple.Docteur ès lettres et sciences humaines, professeur de géographie à l'université Lumière _ Lyon II et à l'Institut d'études politiques de Lyon, directeur général de l'Observatoire européen de géopolitique, membre du comité de rédaction de la revue Hérodote, Michel Foucher, consultant international, collabore également à plusieurs quotidiens et périodiques français et européens.
La vallée du Danube, dans l'histoire de l'Europe médiane, a été un axe économique, politique et culturel important et a puissamment contribué à la cohésion géopolitique, et donc à la stabilité de la zone.
A l'heure actuelle, la vallée du Danube redevient un enjeu essentiel pour les pays riverains - Roumanie, Hongrie, Slovaquie, Autriche et sans doute Allemagne. En effet, de nouveaux flux économiques se mettent en place et " l'identité danubienne " tend à resurgir. Ces phénomènes sont tout à fait récents. Dans quelle mesure la stabilité de l'Europe médiane peut-elle à nouveau se structurer autour de l'axe danubien, tel est l'objet de la présente étude, importante pour la compréhension des mutations géostratégiques de la région.
L'Europe, ce continent ancien, est aujourd'hui un nouveau m'onde, à redécouvrir dans sa modernité, effet d'une convergence historique sans précédent et d'une nouvelle géographie en train de se faire.
L'unité, construite dans la diversité des Etats-nations, figure un bien commun, " la République européenne ". Elle se veut pôle de réorganisation du continent, une oeuvre de longue durée. Renversant la perspective classique de l'interaction entre espace et politique (la politique des Etats est dans leur géographie, (lisait Napoléon), l'auteur avance que la géographie de l'Europe moderne dépend de sa politique : de ce que les Européens, instruits de l'histoire - dans ses progrès et ses régrès - attachés aux vertus du doute comme du débat public, décident d'en faire.
C'est dans cette perspective que la question, réactivée, des frontières finales de l'Europe, doit être abordée, comme décision politique.
Douzième année pour cet ouvrage, désormais traduit en anglais et devenu une référence incontournable sur les affaires européennes !
Entre Brexit, crise catalane et nouvelles perspectives mondiales, comprendre une Europe entre désarroi et rebond est plus que jamais une nécessité : un ouvrage essentiel, pour se construire sa propre analyse !
Pour mieux comprendre le nouvel échiquier mondial, ce numéro propose d'analyser les discours économiques et les représentations géopolitiques, de décrypter les enjeux énergétiques et environnementaux, de mettre à jour les dynamiques culturelles et religieuses, tout en soulignant les articulations d'un monde fondamentalement polycentrique.
Europe, Europes. Ce numéro à plusieurs voix tend à montrer que cette tension entre unité et diversité est au coeur même de ce qui définit l'Europe. Il ne s'agit pas ici d'analyser les perspectives institutionnelles de l'Union européenne, mais de se pencher sur un espace régional, original. Le continent Europe peut se définir, en effet, comme un projet perpétuellement renouvelé, entre unité et diversité.
Europe, Europes. Ce numéro à plusieurs voix tend à montrer que cette tension entre unité et diversité est au coeur même de ce qui définit l'Europe. Il ne s'agit pas ici d'analyser les perspectives institutionnelles de l'Union européenne, mais de se pencher sur un espace régional, original. Le continent Europe peut se définir, en effet, comme un projet perpétuellement renouvelé, entre unité et diversité.
Le Sommaire Point sur :
Europe, Europes. Hier et aujourd'hui Des territoires européens Présence au monde : les échelles de l'Europe Thèmes et documents :
Pour commencer Où s'arrête l'Europe ?
L'Europe centrale vue par...
Regards sur la société européenne Démographies européennes Langues d'Europe : richesse ou obstacle ?
Des croyances diverses Un continent de paix... en construction Vers une culture européenne ?
Économie : diversité et puissance Charpente et maillage du territoire européen L'aménagement du territoire Réseaux de villes et modèle urbain Ruralités européennes L'Europe fluviale La question énergétique Europe mobile versus Europe forteresse Fragments d'Europe La Baltique, un espace de coopération L'Europe méridionale : littoralisation et tourisme Des espaces carrefours Insularités d'Europe L'Europe et le monde L'espace euroméditerranéen existe-t-il ?
La relation Europe/États-Unis, facteur de clivages L'Europe, combien de divisions ?
Les Européens dans le monde De l'influence européenne dans le monde
Notre conception du monde ne cesse de bouger. Espaces nationaux, affrontements économiques, influences culturelles, géographie, diplomatie, démographie, alliances, guerres, sont autant de frontières, de lignes et de fractures qui redessinent la planète des hommes. Les cartes et leur histoire racontent ce monde avec une évidence confondante ;
Elles disent parfois plus et mieux que de longues analyses.
Dans La Bataille des cartesMichel Foucher nous rappelle l'évolution de nos conceptions du monde et de nos représentations de la surface terrestre. Il nous décrit aussi un monde en pleine transformation dont il faut redessiner les cartes pour en comprendre les mouvements et les enjeux. Un monde dont la représentation échappe de plus en plus aux occidentaux, ses initiateurs, et voit l'entrée ou le retour géopolitique des Etats et des sociétés de l'ancien Sud qui revendiquent bruyamment leur place au soleil. Ce mouvement oblige aujourd'hui les occidentaux à se resituer géographiquement, comme ils doivent se resituer politiquement et économiquement dans un monde aux multiples centres de pouvoir et d'influence. Une bataille des cartes où l'Europe ne reste pas sans atouts.
Dans un premier temps, la recherche de la paix, de la démocratie et de la prospérité a conduit les Européens à ne s'attacher qu'à eux-mêmes. Pourtant, à partir de 1989, ils ont compris que leur réussite pouvait attirer les périphéries, pressées de rejoindre le centre. D'où une extension du territoire de l'Europe qui paraît sans fin et inquiète les citoyens.
La nouvelle Europe ne peut se réduire à la protection et à la constitution d'un ensemble fermé.
Comment faire place au « dehors » pour faire vivre le « dedans » ? Comment agir dans un monde mu par de puissants géopolitiques particuliers quand on n'est ni un État ni une nation comme l'Union européenne ? Comment peser sur des acteurs plus enclins aux rapports de force qu'aux compromis ?
Sans doute par la diffusion de règles négociées, par des actions autant civiles et politiques que militaires, lors d'interventions préventives, ou encore par une générosité repensée en direction des sociétés en voie de développement.
Mais l'Europe doit faire plus et mieux. L'Union politique européenne, par sa culture du compromis et sa pratique de la codécision, préfigure un modèle coopératif qui peut être attractif et peser sur le cours de l'histoire. C'est ce que les citoyens européens en attendent.
L'Europe. « La grande question » pour reprendre les mots de Lucien Febvre, dans son cours professé au Collège de France en 1944-1945. Et l'historien de poursuivre par ce que l'Europe ne signifiait pas : ni continent, ni division géographique du globe, ni formation politique définie.
Quelques décennies plus tard, ce nom flottant a su se poser sur une réalité qui est d'abord d'ordre institutionnel : une Communauté transformée en Union à partir de 1991. Le présent ouvrage est donc essentiellement consacré à ce qu'on peut nommer le système européen central : système en raison des interactions inédites qui lient les nations qui le composent ; européen car il incarne aujourd'hui l'idée européenne, en dedans et au dehors ; central car il exerce une attraction irrépressible sur ses voisinages continentaux et méridionaux et y est capable de force d'émission.
Ce système européen central est la réalité géopolitique majeure de la période contemporaine. Si l'analyse géopolitique nous éclaire, elle gagne en efficacité en appliquant à l'espace européen l'outillage interprétatif de la méthode géographique. Car le trait commun de ces territoires, c'est leur mutation, accélérée depuis deux décennies, pour des raisons essentiellement géopolitiques. L'Europe a la géographie de sa géopolitique.
Par leurs expériences historiques et leurs références culturelles, la diffusion de leurs langues et l'addition de leurs savoir-faire, leurs poids démographiques, leurs économies et leurs territoires, ces fragments qui composent aujourd'hui l'Europe en font une entité géopolitique virtuelle.
Encore faut-il, pour continuer de peser sur les affaires du monde, que ce continent, le plus neuf de la planète depuis le lever de rideau de 1989-1990, étendu aussi loin que régnera la démocratie, de l'Atlantique à la Russie et de la mer Blanche à la mer Noire, sache ordonner ses fragments. Pour relever ce défi du siècle à venir, il lui faut assumer des étapes de développement très inégales selon les pays et prendre en compte des processus de formation nationale, les uns aboutis ou presque (en Europe occidentale), d'autres toujours en cours (en Europe médiane et orientale). Toute avancée dans la nécessaire intégration de l'ensemble continental se devra de concilier unité de lieu et discordance des temps ou des représentations.
L'état des lieux dressé par le présent ouvrage le fait apparaître avec force : la cartographie montre les continuités, supports d'une possible unité, comme les ruptures et les conflits potentiels ; le discours du maître d'oeuvre et des auteurs des monographies explique et détaille le bilan auquel deux années d'enquête les ont conduits. L'ensemble forme un ouvrage de référence tout à fait unique en son genre (200 pages de texte, 260 cartes en couleur) qui donne à réfléchir et à espérer à tout Européen soucieux de l'avenir. Cette géographie contemporaine et prospective constitue aussi un précieux outil d'aide à la décision pour quiconque entend déployer des stratégies continentales, en mesurant risques et opportunités.