Dans Cobalt blues le journaliste Erik Bruyland plonge dans l'histoire postcoloniale de son pays natal, la République Démocratique du Congo. Le passé colonial belge s'est transmué en scènes quasid'esclavagedanslesmineslesplusrichesaumonde. Alors pourquoi ce pays tellement riche est-il si pauvre ? Son travail fouillé de journalisme d'investigation dévoilecomment desopportunistes et despéculateursont -commedesvautours -pu mettremain-bassesurlesrichesses minières. Bruyland détricote les carrousels économiques et financiers et les manigances géopolitiques qui ont abouti à la tragédie du Cobalt blues: l'or bleu qu'engrangent des sociétés offshore, la sueur noire n'en récoltant rien. Et tout ça pour satisfaire notre besoin de téléphones intelligents ou de voitures électriques. Une analyse tranchante du dépérissement économique et politique de la RDC,avecenmiroirlerôleetlaresponsabilité del'ancien colonisateurbelge.
Retraçant un parcours de recherche qui l'a mené de l'Afrique du Sud au Maroc en passant par l'Éthiopie, François-Xavier Fauvelle fait ressortir les enseignements d'une histoire qu'il n'est plus permis de nier ou d'ignorer.
Il pointe les défi s d'une documentation fragmentaire qui suppose d'employer fouilles archéologiques et écrits anciens, traditions orales et usages contemporains du passé, tout en déconstruisant les représentations héritées des siècles de la traite des esclaves puis du colonialisme.
Apparaissent alors les richesses d'une histoire marquée par une singulière diversité d'économies, de langues, de croyances religieuses et de formations politiques.
Réinscrite dans ses interactions avec les mondes extérieurs, cette histoire renouvelle notre compréhension des mondes africains anciens et permet de repenser les phénomènes globaux, tels ceux du Moyen Âge, à partir de l'Afrique.
Comment l'Afrique a-t-elle réussi à occuper une place cruciale dans l'histoire mondiale ? Que voulurent réellement les Africains aux différents moments de leur histoire ? Quelles furent leurs résistances à la colonisation et au capitalisme, mais aussi leurs adaptations ? L'État-nation était-il la seule solution quand vint le temps de l'indépendance ? Avec cette fresque de l'Afrique, de ses connexions et de ses interactions avec les autres puissances depuis le XVe siècle jusqu'à nos jours, Frederick Cooper offre une réflexion passionnante sur la fin des grands empires coloniaux européens qui se lit également comme une histoire du monde.
Frederick Cooper est professeur émérite d'histoire à New York University. Spécialiste de l'Afrique contemporaine, de la colonisation, de la décolonisation et de l'histoire des empires, il a notamment publié "L'Afrique depuis 1940", "Repenser le colonialisme" (avec Ann Laura Stoler), "Le Colonialisme en question : théorie, connaissance, histoire", et, avec Jane Burbank, "Empires : de la Chine ancienne à nos jours".
À Paris, on entend de toute part le même refrain : « La Françafrique est morte et enterrée ! » Pourtant, de Ouagadougou à Libreville, de Dakar à Yaoundé, de Bamako à Abidjan, la jeunesse se révolte contre ce qu'elle perçoit comme une mainmise française sur son destin.
Quinze ans après la Seconde Guerre mondiale, la France a officiellement octroyé l'indépendance à ses anciennes colonies africaines. Une liberté en trompe l'oeil. En réalité, Paris a perpétué l'Empire français sous une autre forme : la Françafrique. Un système où se mêlent des mécanismes officiels, assumés, revendiqués (militaires, monétaires, diplomatiques, culturels...), et des logiques de l'ombre, officieuses, souvent criminelles. Un système érigé contre les intérêts des peuples, avec l'assentiment d'une partie des élites africaines et qui profite toujours aux autocrates africains « amis de la France ». Un système que tous les présidents français ont laissé prospérer, en dépit des promesses de « rupture ».
Exceptionnel par son ampleur, inédit par son contenu, cet ouvrage retrace cette histoire méconnue, depuis les origines coloniales de la Françafrique jusqu'à ses évolutions les plus récentes. Rédigées par des spécialistes reconnus - chercheurs, journalistes ou militants associatifs -, les contributions rassemblées dans ce livre montrent que le système françafricain, loin de se déliter, ne cesse de s'adapter pour perdurer.
Arrachés violemment à leur terre et à leurs proches, ils furent des millions à se retrouver enchaînés, entassés comme des bêtes dans des bateaux, contraints à traverser à pied forêts ou déserts dans des conditions tellement inhumaines que presque la moitié d'entre eux en mouraient. Ce crime effroyable, qui a dévasté l'Afrique subsaharienne, a pris de nombreux visages au cours des siècles. Car ses exécuteurs et ses commanditaires sont issus de tous les horizons : de l'Afrique elle-même avec la traite interne, des différentes terres musulmanes avec les traites orientales, de l'Europe avec la traite atlantique.
Pour comprendre l'ampleur et la complexité historique de l'esclavage des Noirs, il faut donc en faire la géographie, qui passe par les routes des différentes traites. C'est cette synthèse que Catherine Coquery-Vidrovitch nous présente ici avec rigueur et pédagogie, loin de toute polémique. Elle s'appuie sur son savoir immense d'historienne de l'Afrique, mais aussi sur le riche matériau réuni dans une série de quatre films intitulée Les Routes de l'esclavage, diffusée par la chaîne ARTE, dont elle a été la conseillère historique, et où interviennent les meilleurs spécialistes issus de nombreux pays.
Un ouvrage aussi passionnant que terrible, qui révèle les rouages d'un système criminel sur lequel s'est construit en grande partie notre monde actuel.
Les Européens se sont longtemps contentés d'aller chercher en Afrique subsaharienne des esclaves pour l'Amérique sans volonté de la contrôler ni de l'explorer.
Avec le processus menant à l'abolition de la traite (1807 pour l'Angleterre), des voyageurs ont porté un autre regard sur l'Afrique intérieure pour en connaître la géographie et les peuples. Si le racisme et les préjugés ne sont pas absents de leurs récits, la bienveillance est parfois là.
Sept explorateurs ont, entre 1795 et 1830, laissé de passionnantes observations sur l'Afrique occidentale. Bien loin du ton dominateur de la seconde moitié du XIXe siècle, ils nous livrent une image riche et suggestive de l'Afrique. Une révélation pour le lecteur européen de l'époque, une surprise pour celui d'aujourd'hui.
L'Afrique subsaharienne est le berceau de l'humanité, et son histoire la plus vieille du monde. Ce petit livre, qui se destine à un public curieux mais non spécialiste, se nourrit d'un demi-siècle de travaux fondamentaux portant sur la question. Non seulement il fait le point sur une histoire au moins aussi variée et passionnante que celle des autres continents, mais il s'attache à déconstruire un à un les grands clichés qui continuent de nourrir les imaginaires occidentaux ; ceux qui font de l'Afrique un continent subalterne, à part, irrémédiablement à la traîne.
Or l'Afrique, depuis toujours, influe sur le reste du monde. Elle lui a fourni main-d'oeuvre, or et matières premières, qui ont joué un rôle essentiel, aujourd'hui encore méconnu, dans la mondialisation économique. Elle a développé, au fil des siècles, un savoir parfaitement adapté à ses conditions environnementales, savoir qui fut taillé en pièces par l'extrême brutalité de la colonisation, pourtant si brève au regard de l'histoire longue.
Mais si on lui a beaucoup pris, l'Afrique a aussi donné, avec une formidable vitalité.
Les textes d'Archéologie des trous se déroulent dans une Afrique du Sud oscillant entre fantastique et réalisme cru. Une narratrice aux yeux perçants et médusés ausculte les trous, qui sont partout : dans les corps, les désirs, la terre saccagée, les vies et les mémoires effacées, les amours et les massacres oubliés.
Dans cette fresque hallucinée, on pourra tout aussi bien autopsier son propre cadavre, vivre à l'intérieur d'une vache, fomenter une révolte de travailleurs migrants, découvrir un empire déchu au fond d'un terrain vague, se livrer au trafic de poux, explorer un trou noir en creusant dans son jardin, ou être présent le jour où les Blancs sont repartis par la mer.
"J'en ai lu des livres sur l'Afrique, depuis le temps que je l'aime et que je m'acharne à la comprendre. Peu d'entre eux m'ont autant éclairé." Érik Orsenna ;
C'est en Afrique, désormais, que se jouent la démographie et la croissance de notre planète. Parmi les premières régions touchées par le réchauffement climatique, ce continent porte aussi en germe les drames humanitaires et écologiques de demain. À rebours des idées reçues, cet ouvrage dresse un panorama complet de la réalité africaine, pour comprendre le présent et appréhender l'avenir. Cette nouvelle édition mise à jour aborde successivement les questions de politique, d'économie et de culture, sans omettre les sujets d'actualité que sont le terrorisme, la pauvreté, l'aide au développement...
Conçu par un ancien diplomate ayant consacré l'essentiel de sa carrière à l'Afrique, il constitue un outil unique de découverte et d'étude, agrémenté d'une douzaine de cartes.
«?Le plus grand crime de tous les temps?», écrit Arthur Conan Doyle en 1909...
Pourquoi tous ces morts, au beau milieu de l'Afrique coloniale?? Pourquoi cet oubli incompréhensible?? Pourquoi ce silence, que rien ou si peu ne vient troubler?? Et pourquoi toutes ces mains coupées, sinistrement immortalisées par des clichés?? On parle aujourd'hui de dix millions de morts au Congo entre 1885 et 1908, soit le tiers ou la moitié de la population concernée.
Pas une ligne dans les livres d'histoire, aucun souvenir dans la mémoire des peuples. Pas ou si peu de résurgences en ces temps de repentance sinon quelques jets de peinture couleur sang sur la statue équestre de l'impérial prédateur, Léopold II roi des Belges.
Pour répondre à ce mystère qui a disparu des forges de la conscience collective, sont convoqués ici ceux qui se sont exprimés précisément sur ce massacre au moment même où les faits se déroulaient : Stanley l'explorateur, Roger Casement, Joseph Conrad, Mark Twain, Savorgnan de Brazza, Conan Doyle ou encore André Gide.
Autant de témoignages pour définitivement ne jamais oublier.
Entre le VIIIe et le XVe?siècle ont existé au Sahel nombre de villes-marchés, de cité-États, de royaumes et de sultanats. La plus célèbre et la mieux documentée de ces formations politiques est le sultanat du Mali (XIIIe-XVe siècle). S'y rapportent tant l'épopée de Sunjata, texte monument de la tradition orale, que la «?charte du Manden?», parfois présentée comme la première déclaration des droits humains. Il est évoqué dans plusieurs des «?manuscrits de Tombouctou?» rédigés au XVIIe?siècle. Au milieu du XIVe, Ibn Battuta aurait séjourné dans la capitale du sultanat, relatant son voyage dans sa fameuse Rihla. Quelques décennies plus tôt, en 1323-1325, son chef Mansa Musa avait défrayé la chronique des savants mamelouks lors de son pèlerinage vers La?Mecque via Le?Caire. C'est alors, sans doute, que nous sommes au plus proche du Mali médiéval.
À défaut de sources internes, ce pôle majeur de l'Afrique au Moyen Âge n'est en effet accessible qu'au travers de ces regards portés sur lui au fil du temps. D'où la nécessité d'une archéologie du savoir, à même de démêler et de comprendre les multiples transformations des manières d'appréhender le Mali, du XIVe?siècle à nos jours. C'est à cette ambitieuse entreprise qu'est consacré cet ouvrage qui, de manière régressive, restitue les métamorphoses des représentations du Mali, pour mieux éclairer ce qu'il est possible de connaître de son histoire.
Sommes-nous africains ? Qu'est-ce que l'Afrique ? De cette double interrogation, née au XVIIIe siècle dans la diaspora africaine déportée aux Amériques, a émergé un vaste mouvement intellectuel, politique et culturel qui a pris le nom de panafricanisme au tournant du XXe siècle. Ce mouvement a constitué, pour les Africains des deux rives de l'Atlantique, un espace privilégié de rencontres et de mobilisations.
De la révolution haïtienne de 1791 à l'élection du premier président noir des États-Unis en 2008 en passant par les indépendances des États africains, Amzat Boukari-Yabara retrace, dans cette ambitieuse fresque historique, l'itinéraire singulier de ces personnalités qui, à l'image de W.E.B. Du Bois, Marcus Garvey, George Padmore, C.L.R. James, Kwame Nkrumah ou Cheikh Anta Diop, ont mis leur vie au service de la libération de l'Afrique et de l'émancipation des Noirs à travers le monde. Mêlant les voix de ces acteurs de premier plan, bientôt rejoints par quantité d'artistes, d'écrivains et de musiciens, comme Bob Marley ou Miriam Makeba, la polyphonie panafricaine s'est mise à résonner aux quatre coins du « monde noir », de New York à Monrovia, de Londres à Accra, de Kingston à Addis-Abeba.
Les mots d'ordre popularisés par les militants panafricains n'ont pas tous porté les fruits espérés. Mais, à l'heure où l'Afrique est confrontée à de nouveaux défis, le panafricanisme reste un chantier d'avenir. Tôt ou tard, les Africains briseront les frontières géographiques et mentales qui brident encore leur liberté.
Le génocide perpétré au Rwanda d'avril à juillet 1994 a été exceptionnel par son envergure, sa rapidité et son mode opératoire : plus d'un demi-million de Tutsi ont été exterminés en cent jours. Les victimes sont généralement tombées sous les coups d'un très grand nombre d'assassins ayant eu recours à des armes rudimentaires. Quels ont été les ressorts d'une telle tragédie ? Quelles en ont été les causes, lointaines ou plus immédiates ? Comment s'est-elle déroulée ? Quelles séquelles a-t-elle laissées ? Ce génocide n'appartient pas qu'à l'histoire : il reste un enjeu politique contemporain, tant au Rwanda qu'ailleurs dans la région et de par le monde, notamment en France. Les débats restent intenses ; les oppositions, souvent violentes. Filip Reyntjens, en s'appuyant sur des faits communément admis, offre des clés de lecture pour une interprétation plus sobre de ce qu'on a appelé le « dernier génocide du XXe siècle ».
Soixante ans après son lever, le « soleil des indépendances », occulté par la persistance de la tentation despotique, peine à éclairer l'Afrique. Au fil des décennies, la cohorte des tyrans, adeptes du pouvoir absolu, du repli clanique et du parti unique, se seront échinés à dévoyer une souveraineté en trompe-l'oeil, moins conquise qu'octroyée.
Qu'il s'agisse de l'Ougandais Idi Amin Dada, de Sa Majesté Bokassa Ier, empereur de Centrafrique, du Congolo-Zaïrois Mobutu ou du Zimbabwéen Robert Mugabe, les ex-tuteurs européens se repaissent des frasques, tantôt grotesques, tantôt cruelles, de satrapes qui furent leurs élèves, leurs soldats puis leurs alliés. Feignant d'oublier que tous, du bouffon ubuesque au dictateur à l'implacable froideur, n'auront été au fond que les rejetons monstrueux de l'aberration coloniale.
Bien sûr, l'ancien tirailleur togolais Gnassingbé Eyadéma ne ressemble guère au Guinéen Ahmed Sékou Touré, l'homme qui osa défier Charles de Gaulle ; pas plus qu'au Tchadien Hissène Habré, premier chef d'Etat du continent condamné par une juridiction africaine. Pour autant, on déniche souvent aux sources de leurs dérives respectives les ingrédients du même élixir toxique : enfance chaotique, appétit de revanche, blessures narcissiques, ivresse messianique et paranoïa.
Dans cette édifiante galerie de portraits biographiques, Vincent Hugeux croque également d'une plume incisive d'autres personnages étrangers au « pré carré » francophone mais tout aussi romanesques, fût-ce dans l'abjection : Yahya Jammeh (Gambie), Teodoro Obiang (Guinée-Equatoriale) ou Issayas Afeworki (Erythrée).
Les uns ont disparu, d'autres règnent encore. Et chacun d'entre eux nous raconte autant notre histoire que la sienne.
Histoire générale de l'Afrique, des origines de l'humanité jusqu'à la nouvelle carte géopolitique liée à la mondialisation des échanges. Le peuplement du continent, la coexistence de l'homme avec son environnement, la construction de sociétés durables, les guerres ethniques, l'instabilité politique et la propagation du Sida son les thèmes abordés.
Un pays ? Pas tout à fait, tant ses frontières sont convoitées et disputées. Un continent ? Pas complètement. Un peuple ? Pas si sûr. Alors, une fresque ? Évidemment !
Le Congo est un tableau peint au rythme de l'Afrique, sur une toile immense où l'ardeur de survivre et l'ingéniosité forment les ressorts d'une naïveté apparente et si séduisante.
Le Congo est musical, il danse, il chante, il vibre quand il rit et quand il pleure, sur les rives du grand fleuve, cette artère profonde de l'Afrique remontée par des aventuriers tout droits sortis du coeur des ténèbres.
Ce petit livre n'est pas un guide. C'est un décodeur. La rumba congolaise y rythme l'amour et les folies de la vie. Le courage des femmes outragées par les guerres interminables y révèle la détermination de surmonter les décennies d'horreur. Un récit à l'image des Congolaises, rempli de leur folle énergie et ode à l'éternelle maternité de l'Afrique.
Récit suivi d'entretiens avec Isidore Ndaywel (La colonisation belge a engendré un esprit de dépendance), Maddy Tiembe (Au Congo, une femme doit obligatoirement avoir des attributs) et Freddy Tsimba (Les artistes congolais sont des créateurs d'identité nationale).
Histoire des révoltes panafricaines propose, à une époque où la quasi- totalité du monde noir vit encore sous le joug colonial, une histoire mondiale de la résistance des Noirs, de Saint-Domingue aux colonies africaines, en passant bien sûr par les États-Unis et les autres îles des Antilles. L'épilogue, écrit par James en 1969, revient sur la décolonisation de l'Afrique, le mouvement des droits civiques aux États-Unis, les conflits dans les Caraïbes, prolongeant, précisant et corrigeant les positions avancées à la fin des années 1930. L'une des premières originalités de l'ouvrage est de rompre avec le cliché des primitifs subissant passivement leur exploitation. « Le seul endroit où les Noirs ne se sont pas révoltés, écrivait James, c'est dans les pages écrites par les historiens capitalistes. » Aussi place-t-il les travailleurs noirs au centre de l'histoire mondiale, incluant, sans les hiérarchiser, un ensemble très divers de rébellions : révoltes d'esclaves, grèves, mouvements millénaristes ou antiracistes. Ce sont les masses qui font l'histoire, dans les conditions et avec les croyances qui sont les leurs ; les leaders, Toussaint comme Nkrumah, Garvey comme Nyerere, ont toujours été portés et produits par des processus collectifs. Manière de sortir aussi bien des approches marxistes axées sur l'ouvrier de l'industrie que des visions hagiographiques exaltant les « grands hommes de l'histoire ». Par son sujet et par son traitement, le livre de James n'a pas pris une ride ; au contraire, il pourrait même être encore en avance sur notre temps.
Dans l'amas des archives de la principale institution chargée de l'histoire et de la mémoire du génocide au Rwanda, plusieurs liasses de fragiles petits cahiers d'écoliers renfermaient dans le silence de la poussière accumulée les récits d'une centaine d'enfants survivants.
Rédigés en 2006 à l'initiative d'une association rwandaise de rescapés, dans une perspective testimoniale et de catharsis psychologique, ces témoignages d'enfants devenus entre-temps des jeunes hommes et des jeunes femmes, racontent en trois scansions chronologiques souvent subverties ce que fut leur expérience du génocide, de la « vie d'avant » puis de la « vie d'après ». Leurs mots, le cruel réalisme des scènes décrites, la puissance des affects exprimés, livrent à l'historien une entrée incomparable dans les subjectivités survivantes et permettent, aussi, d'investir le discours et la gestuelle meurtrière de ceux qui éradiquèrent à jamais leur monde de l'enfance.
Le livre tente une écriture de l'histoire du génocide des Tutsi à hauteur d'enfant. Il donne à voir et à entendre l'expression singulière d'une expérience collective, au plus près des mots des enfants, au plus près du grain de la source. Tentative historiographique qui est aussi une mise à l'épreuve affective et morale pour l'historienne face à une source saturée de violence et de douleur. Loin des postulats abstraits sur l'« indicible », le livre propose une réflexion sur les conditions rendant audibles les récits terribles d'une telle expérience de déréliction au crépuscule de notre tragique XXe siècle.
Cinquante ans après la pseudo-indépendance accordée au Cameroun le 1er janvier 1960, et après quatre ans d'enquête, le récit d'une guerre cachée que la France y a menée, de 1955 à 1971. Coloniale, puis néocoloniale, cette guerre a fait des dizaines de milliers de victimes, peut-être bien davantage.
Dans les années 1950 et 1960, les dirigeants français ont mené au Cameroun une guerre secrète. Pour garder la mainmise sur ce pays clé de son empire, la France a inventé une politique africaine néocoloniale. Alors qu'elle écrasait dans le sang le mouvement nationaliste porté par l'Union des populations du Cameroun (UPC), elle octroya au pays une « indépendance » de façade et plaça à sa tête une dictature « amie ».
S'appuyant sur d'innombrables témoignages et sur des milliers d'archives, les auteurs détaillent les étapes de cette guerre méconnue. Ils racontent comment furent assassinés, un à un, les leaders de l'UPC : Ruben Um Nyobè en 1958, Félix Moumié en 1960 et Ernest Ouandié en 1971. Ils montrent comment l'administration et l'armée françaises, avec leurs relais locaux, ont conduit une effroyable répression : bombardements des populations, escadrons de la mort, lavage de cerveau, torture généralisée, etc. Et ils expliquent finalement pourquoi cette guerre, qui a fait des dizaines de milliers de morts, a transformé le Cameroun en laboratoire de la « Françafrique », ce pacte néocolonial grâce auquel les élites françaises et africaines s'accaparent les richesses du continent et privent les peuples de leurs droits.
D'abord des paysages. Ensuite un envoûtement.
Le Kenya, c'est cette fracture géologique de la grande vallée du Rift que le visiteur se prend comme un coup de poing, dès la sortie de Nairobi. L'Afrique en miroir.
Toute l'Afrique, résumée dans l'histoire d'un pays et dans ses convulsions depuis l'indépendance. Le Kenya est un mythe entretenu par les images de films romantiques et de récits de voyage. Mais dans ses soutes, la fureur n'a jamais été contenue. Les rages ethniques, politiquement exploitées, sont toujours à fleur d'actualité. La mémoire des massacres coloniaux y reste vive. L'ambiance coloniale des clubs si britanniques ne pourrait être plus trompeuse.
Ce petit livre n'est pas un guide. C'est une odyssée africaine, une plongée, page après page, dans le coeur du continent noir.
Les pyramides de Méroé ont fait rêver des générations de voyageurs, mais le Soudan dont elles sont l'emblème demeure largement méconnu. D'où cet ouvrage encyclopédique, première synthèse sur les brillantes civilisations qui s'y sont succédé, de la Préhistoire à la conquête de Méhémet Ali, en 1820.
Préfacé par Nicolas Grimal, professeur au Collège de France, membre de l'Institut (Académie des Inscriptions et Belles-Lettres) et secrétaire général de la commission consultative des fouilles françaises à l'étranger du ministère de l'Europe et des Affaires étrangères, cet ouvrage s'inscrit dans la collection « études d'égyptologie » qu'il dirige. Des spécialistes reconnus font état des découvertes scientifiques les plus récentes ; ce livre n'en est pas moins facile d'accès grâce à la clarté des contributions et à l'abondance de l'iconographie.
Cette édition révisée et corrigée correspond à la partie « Antiquité » d'Histoire et civilisations du Soudan de la Préhistoire nos jours (études d'égyptologie n°15, publié en septembre 2017), augmenté de la préface « Le Soudan carrefour des cultures » de Nicolas Grimal et de la postface « Aux racines de la nation soudanaise » de Claude Rilly.
A la charnière de deux siècles, entre 1880 et 1914, s'est produit l'un des événements majeurs de l'histoire des temps modernes : le partage de l'afrique.
Sept puissances européennes ont participé à ce que l'on a appelé " la course au clocher ", menée jusqu'au coeur d'un continent alors très mal connu : avec la france qui y établit une grande part de son empire colonial, l'allemagne, la belgique, l'espagne, la grande-bretagne, l'italie et le portugal. sept sphères d'influence, plus ou moins vastes, pour cette afrique qui, plus d'un siècle après, malgré des décennies d'indépendance, en porte durablement l'empreinte, à commencer par les frontières héritées de la colonisation et toujours plus contestées.
Pour la première fois sont rassemblés dans un récit global tous les épisodes d'une histoire complexe oú s'intriquent diplomatie et économie, oú se croisent hommes d'etat, chefs militaires, aventuriers chercheurs d'or ou de diamants : brazza et stanley, bismark et ferry, rhodes, goldie et léopold ii, le roi qui se veut entrepreneur au congo ; mais aussi samori, ménélik, le khédive égyptien, le sultan chérifien ou encore, au large du continent, la reine de madagascar.
Entre les discours selon lesquels l'Afrique ne serait pas « entrée dans l'histoire », ceux qui ne se fondent que sur l'orthodoxie économique opposant Nord développé et Sud qui ne le serait pas, et des visions archaïques bien souvent héritées du passé colonial, le continent africain souffre, en Occident, d'une réputation peu enviable. Une réputation aussi fausse que condescendante et que symbolisait déjà, en son temps, la Négrologie de Stephen Smith.
À l'opposé de ces visions étriquées, l'ouvrage d'Anne-Cécile Robert repose sur une connaissance profonde des réalités culturelles, économiques et politiques du continent, comme des regards qui sont portés sur lui. En posant ouvertement la question « Et si, à l'inverse des croyances les plus diffuses, il était possible que l'Occident ait besoin de l'Afrique et non le contraire ? », Anne-Cécile Robert inverse le champ d'analyse et permet d'interroger nos propres modèles économiques (en crise depuis des années) auxquels l'Afrique pourrait fournir des réponses, notamment quant à la transition vers un modèle plus harmonieux dans l'équilibre entre les êtres humains et leur environnement.